L'énergie thermique des mers

Par Guillaume Routiot

    Plan

  1. Introduction
  2. Histoire
  3. Principe de fonctionnement
  4. Avantages et inconvénients
  5. Coût
  6. Conclusion

Introduction

L’Energie Thermique des Mers, ETM ou encore OTEC (Ocean Thermal Energy Conversion en anglais), est une énergie renouvelable, surtout disponible dans les mers tropicales.

En effet, près de la moitié de l’énergie solaire reçue sur Terre est convertie en chaleur dans les eaux des différentes mers tropicales du globe. Une différence de 20°C entre les eaux de surface (plus de 25°C) et les eaux de profondeur (moins de 5°C (prise à au moins 1000 mètres de profondeur)) est suffisante pour mettre en mouvement un moteur thermique et produire de l’électricité et de l’eau douce. Cette énergie renouvelable pourrait satisfaire la totalité des besoins de la planète si elle était exploitée.

Des centrales expérimentales baptisées « OTEC » de plusieurs centaines de kW ont déjà fonctionné plusieurs mois consécutifs. Elles opèrent très simplement : de la même façon qu’une machine à vapeur. Tout en produisant de l’énergie, une centrale ETM peut fournir de l’eau douce, disponible à la consommation, et de l’eau de mer froide riche en nutriment, disponible à l’aquaculture et au refroidissement des bâtiments.

Les nombreuses études japonaises, américaines et françaises concluent à la compétitivité potentielle de l’ETM par rapport aux énergies fossiles comme le pétrole. Cependant, la puissance des centrales expérimentales est actuellement plus de dix fois inférieure à la taille de centrales économiquement viables. Des extrapolations de cet ordre ne sont pas suffisamment crédibles du point de vue des institutions bancaires.

Le faible rendement thermique de l’ETM comparée aux machines thermiques classiques a conduit de nombreux entrepreneurs à croire que le procédé serait trop coûteux pour entrer en compétition avec les énergies fossiles.

Mais la matière première, l’eau de mer, est gratuite, abondante, stable et ne nécessite ni confinement, ni stockage. De plus, l’énergie thermique des mers est largement distribuée dans les mers intertropicales et disponible 24 heures sur 24 tous les jours de l’année. Son exploitation ne produit ni déchet, ni résidu toxique pour l’environnement et son développement permettrait de réduire considérablement les émissions de gaz à effet de serre.

Le challenge actuel est de concrétiser les études qui ont démontré la compétitivité économique du concept.

Histoire

Les débuts :

En 1869, le célèbre écrivain de Vingt mille lieues sous les mers, Jules Verne, est à l’origine de l’idée d’utiliser les différences de températures des mers pour produire de l’électricité .En effet, dans son livre il décrit son procédé par le moyen d’utiliser « eaux de surface et les eaux profondes des océans pour produire de l'électricité ».

Jules Verne

Mais c’est en 1881 que le physicien et inventeur français Arsène d’Arsonval formule pour la première fois le principe de l’énergie thermique des mers (ETM). En se référant aux propos du capitaine Nemo, il suggère de mettre à profit la différence de température entre la surface et le fond de l’océan tropical pour faire tourner une machine thermique et produire ainsi de l’électricité.

Arsène d’Arsonval

Il faudra attendre l’épuisement des réserves de charbons en 1920 pour susciter la recherche de nouvelles ressources en énergies primaires et répondre de cette manière à la demande toujours croissante en énergies de l’industrie.

La même année, l’industriel Georges Claude propose de construire une usine ETM pour la production d’électricité. Mais il se heurte au scepticisme de ses calomniateurs. Ils disent que l’énergie qui serait nécessaire au pompage de l’eau froide devrait être, selon eux, supérieure à celle produite par l’usine, et aussi qu’il serait difficile de construire une « conduite d’aspiration profonde » pouvant résister aux intenses contraintes de l’environnement marin. Le procédé proposé par Georges Claude est celui de l’ETM en « cycle ouvert» qui utilise l’eau comme fluide de travail.

En 1928, à Ougrée en Belgique, Claude confirme l’idée en produisant de l’électricité avec une machine thermique de 60kW qui fonctionne avec de l’eau chaude (33°C) puisée dans le circuit de refroidissement d’un haut fourneau et de l’eau froide (12°C) provenant de la Meuse.

Suite à la réussite de cette expérience, Georges Claude décide de faire l’expérience dans des conditions réelles en utilisant de l’eau de mer (à la place de l’eau douce).

L’épopée cubaine :

En 1930, le premier prototype voit le jour dans la baie de Matanza à environs 100km à l’Est de la Havane (Cuba). Cette "usine" était en fait une centrale de 50kW utilisant de l’eau de surface chaude (25-27°C) et de l’eau pompée à plus de 700m de profondeur (12°C).

Sa construction se fait dès le début de l’année 1929 avec son puit d’arrivée d’eau froide et sa tranchée de protection de l’atterrage de la conduite. Dans un hangar des douanes de Matanza, on construit en même temps la conduite d’eau froide de 2m de diamètre en tôle d’acier ondulée épaisse de 2mm. Georges Claude amènera de France l’usine qu’il a déjà utilisé à Ougrée. Les autres éléments amenés de France seront soudés en tronçon de 22m et seront équipés de collerettes de raccordement et de joints en caoutchouc.

Conduite de 2mm

En attente de leur mise à l’eau et de leur montage pour former une conduite de 2km de long, ces éléments sont peints et recouverts d’isolants thermiques et sont stockés sur une jetée proche de l’usine.

Malgré de nombreux préparatifs et une installation pendant la bonne saison à une période favorable au beau temps; la première tentative de montage rencontrera des conditions de mers difficiles. Cette erreur de la prévision météorologique entraînera la perte de plusieurs centaines de mètres de tronçon.

Suite à cet accident, on utilisera une nouvelle procédure : la conduite sera assemblée dans une rivière et ensuite tiré jusqu’à la mer. On prendra le Rio Canima qui possède une embouchure proche du site. Cette rivière est assez sinueuse mais Georges Claude prendra le risque en pensant que la conduite serait assez "élastique". Mais pour les amener, il fallait tout d’abord enlever les 250m de banc de sable qui obstrué l’embouchure du fleuve. En effet le transport de ces tronçons se fera en les équipant de flotteurs pour les amené suffisamment en aval pour pouvoir les assemblé en les maintenant à leurs positions respectives ancrés à des bocs de bétons coulés au fond de la rivière.

Installation de la conduite

À la fin Août 1929, on commence à tirer les tronçons à l’aide de remorqueurs à 7 km vers la tranchée où aura lieu leurs atterrages. Malheureusement, le milieu de la conduite s’échoue sur le banc de sable qui n’avait pas été suffisamment draguée. La partie en amont de la conduite se plie en "accordéon" et subit d’importants dommages.

Dégagée pendant la nuit grâce à la marée et aux remorqueurs, la conduite coule à 500 m de profondeur sur sa route vers l’usine.

Le budget alloué par les partenaires de Georges Claude est dépassé .Il décide de continuer l’expérience à ses frais.

Georges Claude, suivant les conseils du « senior Vasquez », un ingénieur mis à la disposition de l’équipe française par le gouvernement cubain, il décide d’adopter une nouvelle procédure de pose. Les tronçons seront assemblés sur des essieux de wagonnets posés perpendiculairement à la côte à l’endroit où on été creusées les tranchées d’atterrages. La conduite sera ensuite tirée vers le large par des remorqueurs.

Cette nouvelle conduite d’eau froide commencera sa construction sur place dès le début du mois de Mars 1930. Elle sera composée de 3 éléments qui seront mis en place les uns après les autres afin de réduire une seule longueur de tuyau de 2000 mètres et 400 tonnes.

L’élément C doit être posé de façon à permettre à des scaphandriers de le connecter à l’élément A par l’intermédiaire de l’élément B construit pour compléter la conduite.

L’élément A est mis en place le 8 Juin. Georges Claude fait comblé avec du béton la tranchée afin d’éviter que l’atterrage ne soit détruit par la houle. L’élément C est tiré vers le large 17 jours plus tard. Il est mis en place et maintenu dans le prolongement de la tranchée par 12 remorqueurs et 2 câbles d’amarrages qui lient l’extrémité "terre" en 2 points d’ancrages de part et d’autre du puit d’eau froide.

On fait couler l’extrémité "profonde" de C en vidant lentement l’air que contiennent les flotteurs qui la maintienne à la surface.

C’est une manœuvre délicate et Claude a pris soin de donner « l’ordre écrit » de commencer à vider les flotteurs proches du rivage de finir par ceux situés au large.

Malheureusement son ordre n’est pas respecté et c’est l’extrémité au large qui coule la 1ère : les câbles de retenue subissent une telle tension qu’il cassent et l’élément C est ainsi irrémédiablement perdu.

Georges Claude est maintenant presque ruiné mais s’entête et décide de faire reconstruire un nouvel élément C. IL est positionné correctement le 7 Septembre.

Après la pose du tronçon B qui relie les tronçons A et C, la conduite d’eau froide est enfin opérationnelle. Les essais de la machine ETM peuvent commencer.

Usine ETM de Cuba

Quelques jours après l’installation de la conduite, l’eau profonde arrive enfin dans le puits avec un débit de 4000 m3 par heure et une température de 13°C ; Georges Claude estime que la température au point de pompage à 700 m de profondeur est de 11 °C. Le fonctionnement de la machine thermique est stabilisé. Elle produit 22 kW avec des débits égaux pour l’eau chaude et l’eau froide de 0,2 mètres cubes par seconde et des températures d’entrée et de sortie de 27 à 25°C à l’évaporateur et de 13 à 15°C au condenseur. La perte de charge dans la conduite d’eau froide est mesurée par la hauteur d’eau dans le puits : elle est de 3 mètres.Il déduit de ces résultats que l’on pourrait extraire au moins 300 kW de puissance brute et 240 kW nette d’électricité de chaque mètre cube d’eau froide alimentant une usine ETM fonctionnant avec un écart de température de 24° C; cela sans tenir compte des "nombreuses possibilités d’amélioration du procédé".

Conforté dans ses convictions après le succès de sa démonstration G. Claude propose alors la construction d’une centrale électrique ETM de 25 MW net près de Santiago de Cuba. Il en estime le coût entre 3 et 4 millions de dollars US (valeur 1930). Cette puissance est l’étape intermédiaire qu’il estime nécessaire de franchir avant d’entreprendre la construction de centrales commerciales ETM de plusieurs centaines de MW. Mais la crise économique frappe alors le monde et il ne trouve pas les aides financières nécessaires à la mise en œuvre de sa stratégie de développement de la filière ETM.

Après une dernière aventure, brésilienne celle-là, et l’échec de son usine flottante ETM «La Tunisie» en 1935, la seconde guerre mondiale puis son procès à la Libération pour «attitude collaborationniste» avec l’Allemagne nazie mettent fin aux espoirs de Claude de réaliser son rêve. Il meurt en 1960.

On dit que le puits d’arrivée d’eau froide de l’expérience ETM de Cuba, baptisée «Piscine de Claude», serait devenue la piscine d’eau de mer favorite des écoliers de Matanzas.

L’ETM de 1960 à 1986 :

En 1963 au USA, James Hilbert Anderson anticipe les difficultés techniques de construction des turbines de grandes puissances des usines ETM en suivant le procédé de Georges Claude et propose d’abandonner l’eau comme fluide travail et propose le propane en remplacement.

Aux températures disponibles avec l’ETM, la pression de vapeur saturante du propane est des centaines de fois supérieure à celle de l’eau et pour une puissance donnée les dimensions d’une turbine à vapeur d’eau de type Georges Claude sont plus proches de celles d’une éolienne que de celles d’une turbine à vapeur de propane de même puissance .Mais pour des raisons de sécurité (ou pour la protection de l’environnement) le choix de l’ammoniac semble préférable à celui du propane dans les projets "modernes".

C’est ainsi qu’à l’issue de ses travaux, l’ETM existe sous deux formes de cycles différents : l’ETM en « cycle ouvert » pour le procédé de Georges Claude et l’ETM en « cycle fermé » pour celui de James Hilbert Anderson.

Suite à la 1ère crise pétrolière en 1973, les Etats-Unis et le Japon vont favoriser la recherche pour l’ETM et principalement celle pour le « cycle fermé ».Au USA, elle marquée par la construction du NELH, le Natural Energy Laboratory of Hawaï, où commenceront en 1975 les travaux à terre sur les échangeurs thermiques, évaporateurs et condensateurs de la filière « cycle fermé ».

Puis c’est la réalisation (sur le financement mixte d’industriels et de l’Etat d’Hawaii)et les essais en mer de la 1ère centrale flottante ETM en cycle fermé « Mini-OTEC ». Elle est montée sur une barge ancrée à 900 mètres de profondeur et utilisant l’ammoniac comme fluide de travail. Elle produira 50 kW électriques nets et fonctionnera de façon satisfaisante pendant 4 mois en 1979 avant son démantèlement programmé.

En parallèle, c’est le DoE, le Département de l’énergie des États–Unis, qui (aussi en 1979) finance la réalisation d’un laboratoire flottant, « OTEC-1 » pour la mise au point d’échangeurs eau de mer/ammoniac. Le laboratoire est alimenté par de l’eau froide pompée à 700 mètres de profondeur fonctionnera de nombreux mois avec une puissance thermique de 35 MW.

(La technologie des turbines à ammoniac est bien connue et il s’agissait surtout de tester des échangeurs. La puissance thermique disponible de 35 MW aurait pu fournir 1 MW d’électricité, mais par souci d’économie, OTEC-1 n’était pas équipé de turboalternateur.)

Les expérience « mini-OTEC » et « OTEC-1 » permettront aux industriels américains de valider les différentes procédures d’installations et de tenue à la mer des équipements nécessaires aux futures usines ETM.

Suivant les américains en étant aussi soucieux qu’eux pour leurs dépendances énergétiques et la vulnérabilité qu’elles représentent pour leur économie, en 1974, les japonais proposent un programme de développement des énergies nouvelles baptisé « sunshine project » qui inclue l’ETM avec l’ambition de démontrer la viabilité économique de centrales (de 100MW) à l’horizon 1990. Ainsi suivent différentes expériences tels que :

_ en 1979, une « Mini OTEC » japonaise en cycle fermé avec un fréon comme fluide de travail qui sera mouillée à Shimane dans la mer du Japon ; _en 1980, l’usine expérimentale de Nauru, construite onshore ; elle est comme la précédente du type à cycle fermé (au fréon) et produira 31 kW d’énergie électrique pendant une période de plusieurs mois d’essais terminée en 1982 ; _en 1982, une petite centrale ETM de 50 kW en cycle fermé utilisant l’ammoniac, sur l’île de Tokunoshima au sud de l’île de Kyushu.

Chacune de ses expériences fait partie des plus marquantes de cette période.

La contribution française à l’ETM pendant cette période fut l’étude entre 1982 et 1985 d’une centrale de 5 MW pour la Polynésie française, sans apports scientifiques ou techniques significatifs comparés à ceux des travaux américains et japonais.

Dès 1981, avec l’élection du président Ronald Reagan, l’administration républicaine entreprit de réduire l’aide financière publique à l’ETM avec l’argument que les technologies de la filière étaient suffisamment bien connues (mature) pour que l’industrie privée puisse supporter le risque de son développement commercial. Le fait le plus marquant de ce changement politique fut l’abandon du projet de construction d’une centrale de 40 MW à Hawaï qui devait être cofinancée par le DoE et l’industrie, et dont l’appel d’offre avait été lancé en application du programme proposé par l’administration du président Carter.

En 1986, la baisse des prix du pétrole sur le marché mondial amplifiera cette tendance au désengagement des fonds publics pour le développement de l’ETM. Le désengagement fut total en France, sévère aux États-Unis et sensible au Japon. Il en résultera une « nouvelle donne » du savoir-faire mondial en matière d’exploitation de la ressource ETM avec la domination incontestée des États-Unis et du Japon.

L’ETM après 1986 :

Les cultures japonaises et polynésiennes ont en commun la croyance en des liens privilégiés entre les hommes et la mer, source de vie et de richesses. Beaucoup de politiciens tant au Japon qu’à Hawaï ont puisé dans cette conviction suffisamment d’arguments et de supports populaires pour maintenir une activité de recherche sur l’ETM après 1986.

L’eau pompée en profondeur est froide et peu polluée mais est aussi riche en nutriment. Ces propriétés sont les résultats combinés de la minéralisation des débris organiques entraînés depuis la surface vers le fond et de la circulation thermohaline (circulation permanente à grande échelle de l'eau des océans, engendrée par des écarts de température et de salinité des masses d'eau) de l’eau de mer froide vers les fonds marins dans les régions polaires et la fait remonter lentement à la surface dans les zones d’upwellings naturels après un voyage plusieurs fois séculaire.

Circulation thermohaline

Les chercheurs américains et japonais, forcés par la nécessité d’atteindre la compétitivité et de réduire le coût de l’énergie produite par ETM, se sont ingéniés à trouver d’autres utilisations pour ces eaux profondes qui apparaissaient comme des effluents inutiles après leur passage dans les condenseurs. C’est au NELH que cette politique de valorisation, baptisée DOWA pour deep ocean water application, fut pensée et mise en œuvre, selon différents axes de recherches :

  1. l’économie d’énergie ; par exemple en utilisant ces effluents froids pour la climatisation de locaux
  2. la production d’eau douce ; on savait déjà depuis les travaux de Georges Claude que le condensat du procédé « cycle ouvert » était de l’eau distillée. Mais on a imaginé d’autres procédés : par exemple, en condensant la vapeur d’eau de l’air humide tropical sur des tuyaux dans lesquels circulent les effluents froids
  3. l’élevage et la culture d’algues ; on utilise les effluents d’eau profonde à la fois pour leur richesse en sels minéraux et leur faible teneur en organismes et substances pathogènes, et aussi pour ajuster la température des bassins aux exigences des produits d’élevage

L’imagination des chercheurs tant à Hawaï qu’au Japon les ont conduits à utiliser les eaux profondes à des fins thérapeutiques, culinaires: pour la production de sel de cuisine et de saké, voire à des fins touristiques.

Au Japon, cette politique est encouragée par la création de nurseries d’entreprises, équipées d’installation de pompage d’eau profonde, financées par les préfectures, les collectivités territoriales japonaises. Il en existe une dizaine au Japon dont celles de Kochi (1980), de Toyama (1995), de Kumejima (2000). Le chiffre d’affaires généré par ces activités annexes de la filière ETM se compterait en millions de dollars.

(En 1986, le prix du pétrole baisse. Aux Etats-Unis, il y a diminution de la recherche pour le développement de l’ETM., alors qu’au Japon, on la maintient)

En parallèle, et parfois en coopération bilatérale, le Japon et les États-Unis continuent aussi leurs travaux pour augmenter l’efficacité de la production de l’énergie par ETM. Ainsi le NELH d’Hawaï a abrité les travaux du PICHTR (pacific international center for high technology research) pour la réalisation, puis les essais entre 1993 et 1998 d’une mini usine cycle ouvert à terre de 250 kW en co-opération avec le Japon. Le Japon en coopération avec l’Inde a mis à l’eau en 2001 une usine flottante ETM de 1 MW électrique. Elle serait en cours d’essai, mouillée quelque part au sud du continent indien.

Depuis près de vingt ans, les États-Unis et le Japon ont réussi à maintenir un certain dynamisme dans leur recherche de solutions techniques et d’options économiques rendant l’exploitation de l’ETM de plus en plus attrayante. Ils ont optimisé les performances des composants: échangeurs et turbines, conforté le degré de confiance de la tenue des équipements marins - notamment pour la construction et la pose de conduites d’aspiration d’eau profonde - et développé le concept d’usines ETM multi produits de taille modeste, jusqu’à quelques dizaines de MW. Ce concept d’usine qui permet de valoriser les autres utilisations des eaux froides profondes pour le conditionnement d’air, la production d’eau douce et de produits aquacoles entre autres, est plus particulièrement adapté aux besoins de petites communautés littorales isolées proches de la ressource.

Ils ont également étudié l’extrapolation de la filière ETM à des usines flottantes de plusieurs centaines de MW pour la production en mer de combustibles liquides synthétiques (hydrogène, ammoniac et méthanol) transportables par navires-citernes et répondant au besoin en énergie primaire des pays industrialisés éloignés des zones où la ressource ETM est disponible.

Enfin, les données acquises pendant le fonctionnement d’installations expérimentales leur permettent une certaine appréciation des « impacts » (effets positifs et négatifs) des rejets dans le milieu naturel des effluents d’eau profonde encore froids et riches en sels minéraux, et d’ébaucher des limites à l’exploitation durable de la ressource.

L’avenir de l’ETM :

L’ETM a fait l’objet d’un rapport dans « The Harvard Political Review » en juin 2008 : nombre d’experts américains semblent considérer que l’ETM est la technologie idéale pour subvenir aux besoins futurs des Etats-Unis. Le Docteur Joseph Huang (membre de la National Océanic and Atmospheric Administration et de L’US Department of Energy) a même déclaré qu’aucune énergie renouvelable marine ou terrestre ne possédait un potentiel comparable à celui de l’ETM. Il est de 100 à 1000 fois plus élevé que la consommation de la planète.

Mais cet enthousiasme est vite limité par les investissements énormes qui restent à financer pour les expérimentations et la commercialisation de cette technologie, même si les premières expériences à petite échelle ont prouvé son efficacité. Monsieur Véga du Pacific International Center for High Technology Research a en effet estimé qu’une installation commerciale de MÉGAWATT coûterait 100 millions de Dollars. Cette technique est concurrencée par d’autres technologies marines qui produisent de l’énergie avec la même fiabilité. Par ailleurs les fluctuations des prix des énergies fossiles ne favorisent pas les travaux à long terme.

  • aux difficultés d’une exploitation en zone tropicale où les facteurs météorologiques tel les typhons et cyclones peuvent durablement interrompre la production
  • aux phénomènes de corrosion marine
  • à l’impact d’une telle exploitation à grande échelle
  • aux limites de l’installation côtière d’usines ETM qui ne manqueront pas de défigurer les paysages côtiers
  • De 1986 à aujourd’hui, s’est développée l’idée que le recours aux énergies renouvelables et propres s’imposerait comme une nécessité. Non pas seulement pour pallier de possibles ruptures d’approvisionnements en combustibles traditionnels du fait d’embargos d’origine politique ou de la raréfaction des ressources, mais aussi pour réduire autant que faire se peut les dégradations graves et durables - sinon irréversibles - que l’usage de ces combustibles cause à notre environnement.

    À ce constat s’ajoute celui du changement en cours de la répartition des besoins énergétiques entre pays riches et pays pauvres. Si depuis le début de l’ère industrielle ce sont les pays riches du « nord » qui furent à la fois les plus importants consommateurs d’énergie et les plus gros pollueurs, demain ce seront les pays « du sud », les plus pauvres, qui prendront le relais du fait de la conjonction de leur croissance démographique et de la demande d’amélioration des conditions de vie de leurs populations. Or, c’est dans ces pays que la ressource ETM est la plus accessible.

    Ne rien faire dans cette perspective, c’est accepter d’être confronté à la fois à des modifications climatiques aux conséquences encore imprévisibles et à l’exacerbation des conflits pour l’appropriation des ressources énergétiques dites traditionnelles: fossiles et nucléaires.

    Pour agir, les voies sont multiples : économiser l’énergie, produire en polluant moins, exploiter des ressources nouvelles, propres et renouvelables.

    Personnages présents dans la partie Histoire :

    Jules Verne : né le 8 février 1828 à Nantes et mort le 24 mars 1905 à Amiens, est un écrivain français, dont une grande partie de l'œuvre est consacrée à des romans d'aventures et de science-fiction (appelés du temps de Jules Verne roman d'anticipation). L'année 2005 fut déclarée « année Jules Verne », à l'occasion du centenaire de la mort de l'auteur.

    Jules Verne

    Jacques Arsène d’Arsonval : né le 8 juin 1851 à La Porcherie (Haute-Vienne) et mort le 31 décembre 1940 au même endroit, est un médecin, physicien et inventeur français. On lui doit notamment le galvanomètre balistique, le premier téléphone agréé par les PTT et des études sur l'électrothérapie par les courants à haute fréquence.

    Jacques Arsène d’Arsonval

    Georges Claude : né à Paris le 24 septembre 1870 et mort le 23 mai 1960, est un physicien et chimiste français. C’est un inventeur industriel et praticien remarquable par l’étendue et la diversité de ses travaux. Chimiste de formation, ancien élève de l’École supérieure de physique et de chimie industrielles de la ville de Paris, il commence sa carrière de technicien par ses travaux sur la dissolution de l’acétylène dans l’acétone, découverte qui conduit à l’utilisation industrielle de ce gaz. Indépendamment de Carl von Linde, il met au point en 1902 un procédé industriel de liquéfaction de l’air. Les brevets qu’il prend à cette occasion (avec l'appoint d'André Helbronner) sont à l’origine de la société Air liquide. Il préconise en 1910, mais en vain, l’utilisation de l’oxygène liquide en sidérurgie. Ce procédé ne sera adopté qu’après la Seconde Guerre mondiale.

    Georges Claude

    *PTT = le nom désignant l'administration publique des postes et des télécommunications.

    Principe de fonctionnement :

    En chauffant à sa température d’ébullition (au contact de l’eau de mer chaude puisée en surface) un fluide de travail approprié sous sa forme liquide, il se transforme en vapeur dans l’évaporateur. Si l’on fait passer cette vapeur dans une turbine couplée à un alternateur, avant de l’aspirer vers un condenseur où elle se refroidit (au contact de l’eau de mer froide puisée en profondeur), elle redevient liquide : on a ainsi réalisé une turbomachine à vapeur.

    Principe de fonctionnement

    Le procédé ETM fonctionne selon ce procédé. La «chaleur» nécessaire à la formation de vapeur est prélevée dans les eaux chaudes de surface de l’océan où la température peut atteindre 25 à 28 °C, et le "froid" nécessaire à sa condensation est fourni par l’eau pompée sous la thermocline, à quelques centaines de mètres de profondeur, là où sa température s’approche de quelques degrés centigrades. Pour que le cycle de l’E.T.M. fonctionne, on a besoin d’un différentiel de températures de 20°C, mais plus le différentiel de température est élevé, plus le rendement est élevé. Donc plus on puise l’eau en profondeur, plus le rendement est élevé, car plus on descend en profondeur, plus l’eau est froide.

    Le procédé ETM est donc identique à celui de nos centrales thermiques traditionnelles à combustibles fossiles ou nucléaires. Seules les conditions de fonctionnement changent. Le faible écart de température disponible dans l’ETM rend le procédé moins efficace et lourd en investissement.

    L’ETM a besoin d’énormes volumes d’eau : le débit doit être important pour éviter les déperditions thermiques. Il faut donc des tuyaux de très grand diamètre : ils sont fabriqués en polyéthylène de haute densité et mesurent actuellement 1,5 mètres de diamètre mais pour l’avenir ils devront mesurer plus de 10 mètres de diamètre.

    Il existe à ce jour trois types de centrales ETM :

    À cycle ouvert

    Le cycle commence par le pompage de l’eau de mer de surface. Elle passe dans un évaporateur qui est mis sous vide, pour favoriser l’effet d’évaporation (sous pression relative négative, l’évaporation se produit à plus faible température et la vapeur est débarrassée du sel), d’où la fabrication d’eau douce.

    Sur le volume d’eau chaude passant dans l’évaporateur, seulement 0,5% de vapeur d’eau est produite. La température de l’eau rendue à la mer est de 21°C. La vapeur entraîne un turbogénérateur qui produira de l’électricité.

    Puis, la vapeur est transférée dans le condenseur, qui avec l’eau froide pompée en profondeur vers les 5°C, va faire condenser la vapeur en eau douce qui pourra être utilisée pour la consommation.

    L’avantage du cycle ouvert est donc la production d’eau potable mais les turbines doivent être de grande taille en raison des faibles pressions. De plus il faut créer un vide d’air dans l’évaporateur.

    Cycle Ouvert

    Remarques sur le cycle ouvert:

    À cycle fermé

    Il utilise le procédé inverse d’une pompe à chaleur. On utilise un évaporateur à double paroi qui va servir de lien entre l’eau chaude et un fluide de travail qui est de l’ammoniac (NH3). L’eau va donner sa chaleur et permettre l’évaporation de l’ammoniac (qui s’évapore à une température inférieure à celle de l’eau).

    Le NH3 passe dans le turbogénérateur qui produit l’électricité puis retourne se condenser au contact de l’eau froide (dans le condenseur).

    Le problème essentiel de ce cycle est le caractère corrosif de l’ammoniac.

    Cycle Fermé

    Remarques sur le cycle fermé:

    À cycle hybride

    Il combine les deux techniques avec tout d’abord un cycle fermé. Un second cycle (ouvert) va utiliser le différentiel d’eau pour produire de l’eau potable. Les problèmes de ce cycle sont l’investissement initial plus lourd et un refroidissement plus important des eaux de surface.

    Remarques sur le cycle hybride:

    Avantages & Inconvénients

    A. Une ressource abondante mais limitée géographiquement

    Le Soleil est une étoile parmi des milliards dans notre galaxie (la voie lactée). Sa distance de la Terre est de 149,6 millions de kilomètres.

    Le Soleil et la Terre

    Le Soleil produit sa propre lumière et sa propre chaleur par un processus similaire à celui qui se produit dans une bombe à hydrogène (par réactions nucléaires qui se réalisent dans son noyau selon le mode de la fusion).

    La réaction nucléaire est une transformation d'un ou plusieurs noyaux atomiques ; elle se distingue d'une réaction chimique qui concerne les électrons ou les liaisons entre les atomes. Dans une réaction nucléaire, deux noyaux atomiques entrent en collision et produisent des produits différents des particules originelles. Ces atomes sont pour le soleil l'hydrogène et l'hélium, où ils sont présents dans les proportions respectives de 75 et 25%. La fusion nucléaire produit beaucoup plus d'énergie que la fission (qui consiste à séparer les protons et les neutrons entre eux au sein d’un noyau). Chaque seconde des millions de tonnes d'hydrogène sont transformées en hélium et libèrent une énergie colossale.

    Au cours de ces réactions le Soleil va libérer de la chaleur et différents types de rayons (ultraviolets, visibles, infrarouges, rayons X, etc).

    La lumière transmise par le soleil est formée de ces rayonnements. La distribution de la chaleur dans l’atmosphère et l’océan est due à l’énergie solaire, émise sous forme de rayonnement électromagnétique, interceptée par la planète Terre.

    Le Soleil et la Terre

    Le rayonnement auquel nos yeux sont sensibles ne représente qu'une petite portion du rayonnement que l'on reçoit du Soleil. Il peut se propager dans tous les milieux, vide y compris. 49% du rayonnement énergétique émis par le soleil se situe au-delà du rouge visible, dans l’infrarouge. C’est ce rayonnement que nous ressentons comme une onde de chaleur.

    L'énergie solaire reçue en un point du globe dépend de :

    1. La latitude : vers l'équateur l'angle d’incidence est proche de 90° donc la surface éclairée est plus petite et l'énergie est plus concentrée.

      L’éclairement du Soleil sur la Terre

      Energie reçue par unité de surface E1/S1>E2/S2>E3/S3

    2. la nébulosité (nuages), qui est importante à l'équateur et plus faible en milieu intertropical.
    3. l'énergie solaire envoyée par le Soleil (fluctuations décennales, saisonnières, et ponctuelles).

    Le sol, les océans et l'atmosphère emmagasinent l'énergie. Au contraire de l'atmosphère, l'océan n'est pas transparent au rayonnement solaire qu'il converti en chaleur. Ainsi, la température de surface de l'océan mondial rappelle la structure latitudinale de l'ensoleillement terrestre: la température est élevée dans la bande tropicale (là où l'intensité du rayonnement solaire est maximum) et elle diminue en direction des régions polaires. Près de la moitié de l’énergie solaire reçue sur terre est convertie en chaleur dans les eaux des mers tropicales.

    C’est le phénomène d’absorption de la lumière dans la mer (absorption de l'énergie des photons) qui va permettre la création de chaleur. Sous l'eau on constate que l'atténuation est considérable, les infrarouges sont absorbés dans le premier mètre et peu de lumière atteint les 100 mètres. Au delà de 1000 mètres c'est la nuit noire.

    La thermocline est la zone de transition thermique rapide entre les eaux superficielles et les eaux profondes. Plus en profondeur, sous cette couche, la température chute très rapidement. C'est la fine couche de transition entre les deux que l'on appelle « thermocline ». Sous la thermocline, la température continue de chuter avec la profondeur mais de manière beaucoup moins prononcée. Dans les océans, 90% de l'eau se situe au-dessous de cette thermocline à une température comprise entre 0 et 3°C.

    L'océan étant directement réchauffé par le rayonnement solaire, ses températures les plus hautes se trouvent en proximité de la surface de la mer (car c'est dans les premiers mètres d'eau que le rayonnement solaire est complètement absorbé) comme le montrent les relevés de température au large de Papeete (Tahiti, Polynésie Française).

    Température au large de Papeete
    Profondeur (mètres) Température (°Celsius)
    20 27,2
    100 25,3
    200 21,4
    400 11,1
    600 6,5
    1000 3,9

    Grâce à l'énorme capacité d’absorption thermique de l'eau, l'océan est un énorme réservoir de chaleur.

    Une différence de température de 20°C entre les eaux de surface (plus de 25°C) et les eaux de profondeur (moins de 5°C) est suffisante pour mettre en mouvement un moteur thermique. Un écart supplémentaire de 1 à 2 degrés améliore la production électrique de 12.5 à 25%.

    Ces différences de température sont la limite de cette technologie : seule la zone comprise entre 20°Nord et 20°Sud de latitude est exploitable, ce qui correspond grossièrement à la ceinture intertropicale.

    Au sein de la Communauté Européenne, seules les Antilles (françaises, néerlandaises, britanniques) sont aptes à recevoir des centrales ETM. Et c’est sans doute la France qui a le plus grand intérêt au développement de l’ETM puisque ses territoires d’Outre-mer concernés (Martinique, Guadeloupe, Tahiti, Nouvelle Calédonie) regroupent environ un million de Français.

    Il s’agit donc au total d’une ressource abondante mais dont la production est limitée géographiquement aux zones intertropicales.

     Zones exploitables pour l’ETM

    B. Impacts liés à l’exploitation de l’énergie thermique des mers

    Dans un cycle normal d’utilisation, une centrale ETM ne consomme pas de ressource naturelle non renouvelable et ne produit pas d’agent polluant. Néanmoins certaines interactions avec l’environnement restent à évaluer.

    1. Impact environnemental

      1. Impacts biologiques locaux (cycle ouvert ou fermé)
        • enrichissement en éléments nutritifs des couches superficielles :
        • L’eau de mer froide est particulièrement riche en éléments nutritifs. Si on rejette directement l’eau froide en surface, comme ce fut le cas lors de l’étude de l’OTEC1 en 1981, on note une augmentation des concentrations en nitrates (NO3+ NO2). On constate alors une stimulation locale de la vie aquatique, similaire à celle produite par le phénomène naturel de remontée des eaux profondes à la surface, dénommé l’upwelling.

          La richesse en nutriments de ces eaux profondes ramenées près de la surface favorise la photosynthèse et contribue à la productivité biologique de l’océan. Dans certaines conditions, les «upwelling artificiels», consécutifs à l’exploitation de l’ETM, pourraient contribuer à un accroissement de la production primaire océanique. Les conséquences peuvent apparaître à première vue positives, notamment en cas d’association ETM aquaculture, mais il convient aussi d’évaluer leurs effets à long terme sur l’ensemble de la chaîne du vivant.

        • aspiration des espèces vivantes dans les canalisations
        • Pour la canalisation d’eau chaude, les espèces sous-marines à mobilité réduite (méduses, crustacés, larves) et les organismes microscopiques (phytoplancton) peuvent passer à travers les grilles de protection ou y rester collés à cause des importants flux d’eau (pour mémoire, le diamètre actuel des tuyaux est de 1,5 m et à l’avenir sera de 10 mètres). L’entrée de la canalisation d’eau chaude doit donc être placée loin de la côte pour limiter cet effet. Pour la canalisation d’eau froide, il n y a quasiment plus de vie aquatique au delà de 800 mètres de profondeur.

      2. Impacts biologiques généraux
        • pollution atmosphérique (cycle ouvert ou fermé)
        • L’eau de mer profonde est plus riche en CO2 que l’eau de surface. Il peut être relâché dans l’atmosphère lors du fonctionnement de la centrale. Mais il a été estimé que pour une même quantité d énergie produite, une centrale ETM émettrait trois à quatre fois moins de CO2 qu’une centrale thermique à combustible fossile. De plus, les tests (réalisés au laboratoire NELHA) montrent que seule une petite partie de l’excès est émis dans l’atmosphère dans le cas du cycle ouvert, et encore moins dans le cycle fermé.

    2. Impact thermique

      1. Impacts thermiques locaux (cycle ouvert ou fermé)
      2. Les différences de température de l’eau de mer entre l’entrée et la sortie des canalisations sont faibles (inférieure à 4°C). La sortie des canalisations est située à plusieurs dizaines de mètres sous la surface, ce qui limite l’impact sur la vie aquatique (concentrée en surface).

        Pour des centrales flottantes de très fortes puissantes (400 MW), l’entrée et la sortie des canalisations sont séparées de 90 mètres : le changement de température est alors à l’entrée inférieur à 0.2 °C. L’impact d’une centrale ETM serait alors probablement négligeable.

      3. Impacts thermiques globaux (cycle ouvert ou fermé)
      4. A court terme, l’exploitation ETM concerne surtout les petites et moyennes îles des zones intertropicales. L’effet cumulatif n’est donc pas à craindre dans un premier temps. En revanche, si l’on passe à une phase d’industrialisation intensive avec des centrales ETM supérieures à 200 MW, Martin et Roberts ont modélisé le cas de 100 centrales réparties dans le Golfe du Mexique : ils prévoient un refroidissement de 0.05°C en surface au bout de 30 ans et un réchauffement inférieur à 1°C à 800 m de profondeur. Ces valeurs peuvent paraître faibles mais il s’agit du lieu de départ du courant du Gulf stream. On pourrait extrapoler une situation identique dans la zone asiatique avec le courant Kûro-Shivo.

        Courants

    3. Autres impacts

      1. utilisation de biocides (cycle fermé uniquement)
      2. L’utilisation de faibles doses de biocide (chlore en général) est préconisée pour lutter contre les bios salissures de l’évaporateur. Des expériences à Hawaii dans les années 1990 ont montré que l’addition de 0,05 ppm de chlore une heure par jour empêche la formation de bios salissures et amène à des concentrations moyennes journalières de 0,02 ppm (inférieures au standard américain sur la qualité de l’eau qui autorise une moyenne de 0,10 ppm).

        Ces concentrations sont les mêmes pour des centrales de faibles et de fortes puissances mais le volume d’eau et donc les rejets en chlore seront très augmentés dans le second cas. Les répercussions sur le milieu marin sont donc à évaluer.

      3. Accidents possibles
      4. Dans le cas du cycle fermé, une fuite du fluide de travail est toujours possible. Néanmoins, l’industrie maîtrise l’utilisation de l’ammoniac (exemple : circuits de réfrigération des patinoires) et possède l’expérience de la prévention des fuites.

        Une petite fuite ne mettrait pas la vie marine en danger (l’ammoniac est un élément nutritif). En revanche, une fuite majeure serait une menace sérieuse pour l’environnement.

      5. Impact visuel
      6. On peut craindre en regardant l’usine expérimentale de Hawaï ses répercussions sur les côtes des îles intertropicales et sur les écosystèmes locaux. La côte est clairement défigurée et on peut être craintif face au développement d’usines en grand nombre et de forte puissance. La solution des plates formes en mer semble moins « polluante » visuellement et moins agressive pour l’écosystème. Par contre, elles sont beaucoup plus sensibles aux phénomènes climatiques tels que les ouragans ou typhons, fréquents en zone intertropicale.

        Usine ETM Nearshore OTEC

        Au total, le bilan net de l’implantation d une centrale ETM sur la vie aquatique dépend principalement d’une part de l’enrichissement nutritif lié au rejet de l’eau de mer profonde, d’autre part des effets de cette aspiration.

        Pour des centrales ETM de moins de 20 MW, les risques écologiques et commerciaux (pêche) associés sont faibles ou inexistants, voire positifs.

        Aujourd’hui, l’ensemble des modélisations d’impact et des résultats d’études sur les centrales OTEC montre que leurs conséquences environnementales sont très faibles en comparaison de celles à combustibles fossiles. Les centrales de faible puissance pourraient même avoir un impact positif. A l’échelle globale, on peut établir qu’en utilisant seulement 0.07% de l’énergie solaire absorbée par l’océan, les impacts environnementaux seraient insignifiants.

        La production d’énergie sous forme électrique serait alors de plus de 10 millions de MW (l’équivalent de plus de 6500 tranches de centrales nucléaires de 1500 MW chacune).

    C. Autres applications que permet l’énergie thermique des mers

    Une installation ETM ne se réduit pas à une centrale produisant de l’énergie.

    À long terme, des barges flottantes de 100 MW proches des côtes ou réparties sur les océans intertropicaux pourraient concurrencer les centrales thermiques classiques dans la production d’électricité ou de combustible synthétique (comme l’hydrogène). Un combustible synthétique a l’avantage (contrairement à l’électricité) d’être facilement transportable jusqu’à la côte. Une évaluation actuelle, détaillée et montrant l’intérêt de ce type de production via le concept ETM a été menée par William H. Avery. En attendant, il est nécessaire de commercialiser des centrales de l’ordre de 10 MW afin d’assurer le développement de la technique ETM.

    La technologie nécessaire à la construction d’une usine ETM de 10 MW est déjà disponible. Cependant, l’important investissement par kW installé mine la rentabilité d’une telle centrale si elle se limite à la vente d’électricité. En sortie de centrale, l’eau douce et l’eau de mer profonde constituent deux co-produits fortement valorisables, qui pourraient rapporter plus que la vente de l’électricité elle-même.

    L’eau douce est recherchée dans de nombreux endroits de la ceinture intertropicale, en particulier pour l’irrigation et cette eau est potable. Elle est émise directement dans le cas du cycle ouvert. Le cycle fermé peut être adapté pour en produire : un étage supplémentaire de la centrale utilise alors la faible différence de température de l’eau de mer après passage dans le premier étage pour en distiller une partie. Ce second étage fonctionnerait ainsi de la même façon qu’un cycle ouvert sans turbogénérateur.

    L’eau de mer froide, pompée et utilisée par la centrale ETM a de nombreuses applications, dont les deux principales seraient la réfrigération des bâtiments et l’aquaculture :

    En conclusion, pour un volume donné d’eau de mer profonde, certaines études suggèrent que les revenus de la vente des co-produits générés par une centrale ETM seraient plusieurs fois supérieurs aux revenus générés par la vente de l’électricité qu’elle produit.

    Autres Applications

    Les coûts :

    Les éléments manquent pour établir les coûts réels de futures unités industrielles. Tous les acteurs s’accordent pour décrire de lourds investissements initiaux.

    Les investissements financiers concernant l’infrastructure sur une centrale ETM fonctionnant en cycle fermé ou en cycle ouvert sont proches. En effet, le coût supplémentaire d’un échangeur à paroi dans le cas du cycle fermé est compensé par le surcoût de la turbine (de grande dimension) et du système de dégazage du cycle ouvert. Le choix du cycle ouvert est très intéressant dans le cas où l’eau douce peut-être commercialisée.

    Ce n’est qu’en tenant compte de la vente de l’eau douce et des autres produits dérivés, qu’on peut envisager générer des profits.

    La situation récente d’un pétrole très cher et les perspectives d’épuisement des ressources fossiles sont des éléments forts pour un investissement dans le cadre du long terme. Mais la variabilité des prix du pétrole et la crise financière actuelle sont d’importants barrages à l’investissement par des sociétés privées. Seuls les pays riches (Etats-Unis, Japon, Europe…) semblent pouvoir être en mesure de ne pas avoir une vision de rentabilité à court terme.

    Enfin, l’électricité n’est pas un produit stockable contrairement aux énergies fossiles et les sites potentiels de production sont soumis aux ouragans et typhons qui inévitablement provoqueront des coupures dans la production et la distribution. Ces phénomènes doivent être pris en compte dans les coûts indirects de cette technique.

    Conclusion

    Il y a un peu plus d’un siècle, un physicien français propose une source d’énergie propre et renouvelable. Il baptise le concept d’ETM, Energie Thermique des Mers, qui deviendra OTEC en anglais. En utilisant l’océan comme collecteur de chaleur solaire, il montre la possibilité de produire de l’énergie propre, renouvelable, disponible en quantité suffisante pour subvenir aux besoins mondiaux à longueur de jour et d’année. De nombreuses études récentes établissent la faisabilité technique d’une centrale ETM et sa compétitivité commerciale par rapport aux centrales thermiques à combustibles fossiles. Les nuisances environnementales associées sont très faibles et le développement du concept permettrait une réduction des émissions de gaz à effet de serre, donc du réchauffement planétaire.

    Cependant, le premier marché vise les petites et moyennes îles, principalement de pays en voie de développement, donc incapables d’investir à moyen et long terme sur des projets d’une dizaine à plusieurs centaines de millions d’euros. Le premier choc pétrolier a permis aux pays développés comme le Japon, la France et les Etats-Unis de prendre conscience du potentiel de l’ETM. Depuis, de nombreuses études ont été menées, beaucoup de brevets internationaux ont été déposés, mais très peu de réalisations concrètes ont vu le jour. Ceci s’explique en partie par le scepticisme envers les nouveaux modes de production d’énergie, en particulier ceux dont la rentabilité exige un investissement initial conséquent.

    Aujourd’hui, le contexte est de nouveau favorable à la promotion de l’ETM (prix du baril de pétrole qui ne cessera d’augmenter à moyen et long terme vu l’épuisement de la ressource, accords de Kyoto, ouverture du marché de l’énergie).

    Néanmoins la crise financière actuelle est un frein certain, vu les investissements nécessaires. Les impacts environnementaux n’ont été étudié que sur de petites échelles, le développement à plus grande échelle devra être suivi de près ce qui ne manquera pas d’impacter encore un peu plus les coûts de fonctionnements et enfin la ressource est limitée géographiquement.

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